Cette année, le Centre national de danse-thérapie a développé un nouveau projet en présentiel pour les élèves de l’école secondaire L.I.N.K.S., à Montréal. L’objectif était de mener des classes de danse pour des adolescents avec un trouble du spectre de l’autisme. En tout, ce sont 66 jeunes entre 13 et 21 ans qui ont pu bénéficier des bienfaits de la danse tout au long de l’année.
Angélique Dumet-Kerherno et Violaine Bonnassies, les deux professeures de danse et danse-thérapeutes stagiaires qui ont eu la chance de côtoyer les jeunes, nous parlent de l’expérience.
Violaine : « Le travail à deux permet de soutenir individuellement les jeunes qui ont davantage de besoins, comme, par exemple, un jeune malvoyant dans l’un des groupes. Il permet aussi de mettre en commun nos forces pour insuffler le plaisir de danser et répondre aux besoins variés. Chaque groupe est différent et a sa couleur particulière : à nous de faire preuve de créativité pour répondre aux besoins de 8 groupes avec qui nous avons travaillé. Je me suis sentie comme un poisson dans l’eau qui nage et travaille à faire circuler le courant, en étroite collaboration avec ma collègue Angélique.»
Angélique : « Comme le dit Violaine, travailler à deux offre la chance inestimable de pouvoir mener un groupe tout en répondant aux besoins d’un seul individu dont les besoins sont plus grands : un participant malvoyant, un autre dont l’attention doit être ramenée au cours de danse, un élève satellite que l’on voudrait voir participer…
Dans tous nos cours, il y a une phase de déplacement (nous avons la chance d’avoir accès à un grand gymnase), l’une de nous deux se place au départ et explique les consignes tandis que l’autre se positionne en fin de parcours pour accueillir et encourager. Cela a tellement de valeur. Je me trouve personnellement privilégiée de travailler dans ces conditions. Et plus que tout, ce sont ces fantastiques étudiants qui en bénéficient. Et cela est inestimable. Les GBC ont vraiment à cœur les progrès de chaque enfant. »
Angélique : « La danse participe à la construction de l’esprit d’équipe, au sentiment d’appartenance. Ce sentiment peut être renforcé par des jeux à deux, à trois et en groupe. Depuis des millénaires, la ronde où chacun se tient la main, tourne, va au centre à l’unisson est un symbole d’unité et favorise le contact, l’intimité.
Cette année, à cause de la Covid-19, il nous est impossible d’y recourir. Or, le contact, visuel et physique, étant un point sur lequel les autistes doivent redoubler d’efforts pour répondre aux besoins standard de la société dans laquelle les neurotypiques sont en majorité, il nous a fallu, à notre tour, redoubler d’efforts pour trouver des moyens d’encourager le contact. Nous avons conservé l’idée du cercle… mais à distance. Nous faisons quelques pas vers le centre… sans jamais s’en approcher ! Mais nous nous regardons, nous nous écoutons, nous reprenons les gestes initiés par chaque membre du cercle en canon pour montrer la cohésion de tous : étudiants, éducateurs et professeurs.
Un truc que j’aime utiliser, mais qui demande une implication sur le long terme, ce qui a été le cas dans ce projet, est la musique. Le rythme est inhérent à la cohésion selon moi, et encore plus dans ce contexte où certaines interventions sont interdites. En s’appuyant sur les propositions des élèves, j’ai tenté de trouver la chanson qui embarque tous les étudiants d’une même classe à danser avec le même engouement, sur le même rythme, développant ou renforçant le sentiment d’appartenance nécessaire au développement de l’estime de soi. »
Violaine :« Le masque nous ont amenées à ralentir souvent pour respirer, brisant parfois le momentum: cela a permis en même temps d’outiller les élèves par des mouvements de respiration et une conscience corporelle accrue. Nous avons eu l’avantage d’avoir un gymnase avec beaucoup d’espace, ce qui a facilité grandement le respect des mesures et le maintien des groupes classe-bulles »
Angélique et Violaine : « Nous remarquons que la danse permet aux élèves de se détendre, de s’exprimer, de travailler leur posture, d’améliorer leurs habiletés sociales, émotionnelles et physiques.
Les élèves sont plus engagés quand les enseignants dansent aussi. Cette demande provient souvent des élèves eux-mêmes d’ailleurs. Le fort esprit de collaboration de l’équipe de L.I.N.K.S. nous a permis de travailler ensemble pour faire face aux défis rencontrés et apprendre à mieux connaître les élèves.
Selon les intervenants, nos classes de danse améliorent la cohésion du groupe, développent la collaboration et renforcent la confiance en soi. Certains enseignants disent aussi bénéficier de nos cours.
Voilà quelques commentaires d’élèves entendus à la fin de nos sessions: "Je suis prêt pour la semaine maintenant", "J’aime la danse", "Je veux rester ici", "Merci de nous permettre de danser librement", "Je me sens bien", "Je me sens calme", "Je suis prêt pour travailler" !
En dansant, les élèves ont pu bénéficier de cet art merveilleux qui guide vers la connexion de soi, cultive la connexion aux autres et apporte des bienfaits essentiels à la régulation émotionnelle et à l’équilibre entre le corps, l’esprit et l’émotion.
Pour marquer leur accomplissement en cette fin d’année, faute de rassemblement, les élèves ont été filmés pour montrer un aperçu de leur routine de danse à leurs familles et au membre du personnel de l’école, une façon pour ces adolescents de célébrer le Spring show de leur école, et pour nous de célébrer la vitalité inhérente à la danse ».
Restez à l'affût des nouvelles et promotions du Centre national de danse-thérapie